On fait parfois l’erreur, lorsqu’on cherche à guérir de l’anxiété, de vouloir s’en débarrasser totalement. Cette réaction désagréable, aux conséquences et aux manifestations pénibles, qu’on ne sait pas gérer. Je vois trop souvent, sur les réseaux, des personnes proposer des programmes pour s’en défaire une bonne fois pour toutes, et j’avoue que ça me fait grimacer.

Parce que l’anxiété est utile, et que ne pas lui faire de place a toutes les chances de nous faire plus de mal que de la ressentir.

Je ne dis pas qu’il est impossible et inutile de la réguler. Je dis que comme tous les ressentis émotionnels, l’anxiété doit pouvoir exister pour qu’on puisse fonctionner correctement. C’est son intensité, sa fréquence, les raisons de son apparition, qu’il est intéressant d’aller regarder.

guérir de l'anxiété

A partir de quand parler de guérison de l’anxiété.

Le stress, l’anxiété et l’angoisse ne sont pas un trouble anxieux à guérir.

Parce qu’on peut rapidement mélanger les notions, il est important ici de savoir de quoi on parle.

L’angoisse est une réponse émotionnelle intense, souvent liée à une menace immédiate ou à un danger perçu, en tout cas à une situation précise dans le temps. Elle est souvent accompagnée de sensations physiques fortes, et peut grandir jusqu’à la crise d’angoisse, qu’on pourra calmer par des techniques de régulation corporelle comme la respiration (lien).

L’anxiété est une réponse plus diffuse et anticipatoire. C’est une inquiétude, une incertitude pénible, une appréhension de ce qui pourrait arriver. Elle est associée à un sentiment d’insécurité face à l’impression d’un danger imminent, et est difficile à contrôler. Elle peut donc être moins intense que l’angoisse, mais dure souvent plus longtemps.

Le stress, lui, est un état réactionnel à une agression. Il est associé à la peur, et lié à la survie (contrairement à l’anxiété, liée à un risque de mal-être). C’est une réaction normale, que tout le monde vit, et qui nous a permis de nous adapter en tant qu’espèce qui a évolué. C’est lui qui signale au corps la nécessité de se préparer à l’action en mobilisant toutes ses ressources pour faire face à ce qui arrive.

… Mais ils peuvent devenir handicapants.

Le stress et l’anxiété sont donc des mécanismes parfaitement normaux et importants pour la survie de l’organisme ou pour atteindre ce qui est important pour nous. C’est le stress qui me dit, si une voiture fonce vers moi, qu’il serait bon pour moi que je m’écarte très vite, sans même que j’aie le temps de réfléchir. Si je dois parler devant 50 personnes pour leur donner une formation, c’est grâce à mon anxiété que je vais imaginer les ratés possibles et les anticiper du mieux possible.

Mais, dans le cas de troubles anxieux ou de stress prolongé, les effets sur le corps et l’esprit deviennent beaucoup moins bénéfiques, et la qualité de vie peut s’en trouver altérée. Et là, d’accord, on peut parler de vouloir guérir de l’anxiété, et chercher des stratégies pour répondre aux évènements de façon plus adaptée.

Les troubles anxieux.

L’anxiété n’est donc pas une pathologie en soi. Mais quand elle dure dans le temps, que sa fréquence et son intensité a un impact important sur la vie de la personne qui la ressent, on peut s’interroger sur l’existence d’un trouble de l’anxiété. Il en existe de plusieurs sortes, qui peuvent être combinés entre eux ou avec d’autres troubles. Il est intéressant de savoir de quel trouble anxieux on souffre, pour pouvoir y répondre avec les traitements et stratégies les plus adaptés et ciblés possible. Cela peut se faire en accompagnement psychologique.

Le trouble panique.

Il est caractérisé par des attaques de paniques récurrentes et inattendues. L’attaque de panique (ou crise d’angoisse) est un évènement court et intense pendant laquelle la personne peut avoir peur de mourir tellement les signes physiques sont brusques et intenses, jusqu’à lui faire penser à un infarctus.

Une première attaque de panique peut créer un sentiment de vulnérabilité énorme, face à une situation ou aux sensations corporelles vécues. La personne peut donc craindre les situations menaçantes, et mettre en place de l’évitement de ces situations. Elle peut aussi être dans la suranalyse des sensations corporelles. L’ensemble peut créer un cercle vicieux, une spirale de la panique (Clarks, 1990), où l’évitement et la suranalyse, mis en place pour se protéger, vont en réalité renforcer l’anxiété.

L’agoraphobie.

Ce trouble se reconnaît par une peur ou une anxiété liée à au moins deux des situation suivantes :

  • Utiliser les transports en commun
  • Etre dans des endroits ouverts (ponts, marchés…)
  • Etre dans des endroits clos (magasins, cinéma…)
  • Etre dans une file d’attente ou dans une foule
  • Etre seul à l’extérieur du domicile

Ces situations sont évitées par la personne parce qu’elle a peur de ne pas pouvoir s’en échapper en cas de besoin, d’y faire une crise de panique sans pouvoir être aidée, ou d’y vivre un évènement embarrassant (comme de l’incontinence). L’anticipation négative créé de l’anxiété, l’anxiété créé de l’évitement, qui lui, provoque une altération dans la vie sociale et/ou professionnelle.

Les phobies spécifiques.

Les phobies peuvent être classées en 4 sous catégories :

  • Phobie d’un animal
  • Phobie d’un environnement naturel (hauteurs, mer …)
  • Phobie médicales (sang, hôpitaux, aiguilles …)
  • Phobie situationnelle (espaces confinés, avion …)

Elles peuvent être liées à des expériences traumatiques, mais aussi venir de l’entourage, quand par exemple un enfant reçoit des informations anxiogènes.

L’anxiété sociale.

Autrefois appelée phobie sociale, elle consiste en une crainte excessive du regard et du jugement des autres. La personne concernée ressent une anxiété importante avant et pendant les situations sociales, et une honte lorsqu’elles sont terminées jusqu’à ne pas réussir à en parler à ses proches. Et ce, quel que soit le nombre de répétition de ces situations.

Le ressenti est proche de celui que n’importe qui pourrait ressentir en s’apercevant qu’iel est nu·e devant une assemblée curieuse et moqueuse, et en étant obligé·e de recroiser ces mêmes personnes ensuite. Et cela, pour des situations beaucoup plus courantes et « banales » du quotidien.

Comme dans l’ensemble des troubles anxieux, l’anxiété sociale peut amener la personne à éviter les situations qui lui posent problème, parfois de façon très subtile voire inconsciente, ce qui malheureusement entretient et aggrave l’anxiété. L’altération de la vie sociale et professionnelle est forte, et le risque de développer un trouble de l’humeur comme la dépression est important.

Le trouble anxieux généralisé.

C’est ce que je résume parfois en « dans le doute, on panique ».

Souffrir d’un trouble anxieux généralisé, ou TAG, c’est vivre une anxiété excessive et injustifiée, de façon constante et durable, difficilement contrôlable. Les cogitations sont très présentes, mais avec une difficulté à réfléchir posément à un problème et à passer à l’action. Tout peut être un sujet de préoccupation, l’absence même d’anxiété peut être vécu comme stressant. La souffrance, les manifestations somatiques ( = dans le corps) et l’altération du quotidien peuvent être majeurs.

Là encore, l’évitement tend à renforcer le problème : évitement des situations, des informations, des prises de décision, des mises en action (la procrastination peut être importante) … Tout en ayant l’impression d’agir sur la préoccupation, puisque la rumination prend beaucoup de place. Et en ayant une tolérance à l’incertitude très basse.

L’inconfort, voire la détresse, peuvent être énormes et durable.

Guérir de l’anxiété, au final, ça veut dire quoi ?

Evidemment, dans les troubles listés, la priorité va être de trouver et consolider des stratégies pour réguler l’anxiété, à la fois pour qu’elle atteigne un niveau où il sera possible d’agir, et pour que la personne anxieuse soit capable de suivre le travail co-construit avec sa/son thérapeute. Parfois, un traitement médicamenteux pourra être nécessaire, pour rendre possible ce travail.

Mais en aucun cas, il n’est possible de faire disparaître l’anxiété. C’est une émotion normale, nécessaire, qui nous permet de nous adapter au monde. Chercher à l’effacer ne reviendrait pas à s’en libérer, mais à ne plus l’écouter pendant qu’elle s’époumonne en arrière fond.

L’objectif d’un accompagnement sera de faire en sorte de retrouver une qualité de vie où l’anxiété ne dirige plus en tyran. Et pour ça, le meilleur moyen, c’est d’écouter ce qu’elle nous dit, et de travailler avec elle.

On en parle ensemble ?