Parmi les particularités rencontrées lorsqu’on est sur le spectre autistique, les crises autistiques tiennent une place importante.

Souvent mal comprises et donc mal vues dans une société qui ne comprend pas l’autisme dans toute sa profondeur et sa variété d’expressions, elles sont trop souvent vues comme des caprices, un manque de volonté ou un comportement enfantin, alors qu’elles peuvent représenter une souffrance et un handicap non négligeables pour les personnes concernées.

Ici, on va parler de ce qu’elles impliquent réellement, et de tips pour les gérer au mieux.

crise autistique

Crise autistique : de quoi on parle ?

Qu’est ce qu’une crise autistique ?

Une crise autistique est une réaction intense et incontrôlable qui peut se manifester chez une personne autiste lorsqu’elle est submergée par des stimuli internes ou externes qu’elle n’arrive plus à gérer. C’est une réponse involontaire à une situation de détresse, un mécanisme de défense en réponse à une surcharge qui dépasse ses capacités d’adaptation.

Ces crises ne sont pas un choix conscient. Elles se déclenchent quand une personne autiste, souvent sensible à son environnement, se retrouve dans une situation qu’elle perçoit comme trop agressive ou destabilisante. Le cerveau, débordé par une quantité excessive d’informations, entre dans un mode de « survie« . S’en suit une perte temporaire de contrôle des réponses émotionnelles, physiques et comportementales.

Les déclencheurs peuvent être variés d’une personne à l’autre, d’une situation à l’autre :

  • surstimulation sensorielle : bruits forts, soudains ou prolongés ; lumières vives, clignotantes ou fixes ; textures inconfortables …
  • situations anxiogènes : changements inattendus, modification de routine imposé ; situations sociales stressantes ; incompréhension des interactions sociales ; difficultés dans la communication ; conflits interpersonnels …
  • stress cumulatif : accumulation de stress non régulé au fil du temps, qui peut conduire à une réaction en cascade.

Le meltdown : la crise explosive.

C’est la plus visible des crises autistiques, et par conséquent, celle qui peut provoquer le plus de jugement et donc de peur du regard extérieur. Cette peur vient alors s’ajouter à la surcharge déjà existante, et rend l’apaisement plus difficile si l’environnement n’est pas respectueux et sécurisant.

Les manifestations d’un meltdown peuvent être :

  • un débordement émotionnel : les émotions deviennent extrêmement intenses, jusqu’à être impossibles à gérer. Il peut s’agir de colère ou de frustration intense, de tristesse profonde ou de détresse, d’anxiété ou de panique, de confusion ou de désorientation, de sentiment de vulnérabilité ou d’impuissance …
  • une hyperstimulation sensorielle : les bruits, les lumières, les odeurs, les textures… peuvent provoquer une sensation d’agression, et favoriser l’augmentation du stress et de l’anxiété.
  • une perte de contrôle, partielle ou totale, sur ses émotions, ses pensées et ses actions jusqu’à une impression d’être déconnecté·e de la réalité.
  • des symptômes physiques : sensation de compression dans la cage thoracique ou la gorge, difficulté à respirer ou respiration rapide, accélération du rythme cardiaque, tremblements ou frissons, maux de tête, sensation de vertige, nausées, douleurs abdominales …

Le shutdown : la crise interne.

Lors d’un shutdown, on assiste plutôt à un repli de la personne sur elle-même. Contrairement au meltdown, où la personne extériorise sa détresse, le shutdown est une réaction plus intériorisée, où la personne « s’éteint » temporairement pour faire face au stress.

On peut y retrouver :

  • un retrait social : difficulté à répondre verbalement, réponses très courtes parfois jusqu’au mutisme total ; repli physique, évitement du contact visuel, besoin intense de s’éloigner des interactions et d’un environnement vécu comme agressif …
  • un blocage cognitif : altération des capacités de réflexion, de prise de décision ou de résolution de problèmes, voire incapacité totale.
  • une dissociation cognitive et émotionnelle : sorte de court-circuit du cerveau pour se protéger de ce qu’il ne peut plus gérer, d’anesthésie temporaire. Cela peut prendre la forme d’une déconnexion d’avec ses émotions, d’avec le monde extérieur voire intérieur, et provoquer une impression de flottement, de dépersonnalisation (impression de ne pas être réellement dans son corps), de déréalisation (impression d’être comme dans un rêve), une altération de la perception du temps et de l’espace …

Accompagner au mieux la crise autistique.

Particularités et conséquences de la crise autistique.

Une crise autistique n’est pas une crise émotionnelle « classique ». Une crise émotionnelle chez une personne neurotypique peut être contrôlée ou régulée plus rapidement, une fois que les facteurs de stress sont réduits ou que la personne a été rassurée. En revanche, dans une crise autistique, la personne perd temporairement l’accès à ses capacités d’auto-régulation. Elle ne peut pas simplement se calmer ou être apaisée par des encouragements verbaux.

Certaines personnes expérimentent plutôt des meltdown, d’autres plutôt des shutdown, mais les deux peuvent exister chez une même personne selon les situations et l’état initial. Un shutdown peut être un moyen d’éviter un meltdown, mais peut aussi se déclencher si un meltdown n’a pas pu s’exprimer. Malheureusement, il n’y a pas de règle pré-établie et il est important d’observer ce qui se passe pour s’adapter au mieux, qu’on soit concerné·e par les crises ou proche d’une personne concernée.

Après une crise autistique, la personne est souvent épuisée physiquement et émotionnellement. Elle peut ressentir une grande fatigue, de la confusion, ou même un sentiment de honte ou de culpabilité. S’accorder un temps de récupération et de soin de soi est primordial.

Si vous êtes concerné·e par les crises autistiques, vous pouvez

  • Vous mettre en sécurité : si possible, déplacez-vous vers un endroit calme et sûr où vous pourrez vous sentir plus à l’aise et moins stimulé·e. Dans tous les cas, essayez de réduire les stimulations sensorielles et cognitives au maximum (porter un casque anti-bruit, ne pas devoir parler…).
  • Décharger émotionnellement : si vous en avez besoin, laissez sortir vos émotions de façon sécure, pleurez contre une peluche, tapez dans un coussin… Autorisez-vous à évacuer le trop-plein.
  • Pratiquer des techniques de régulation émotionnelle : quand c’est possible pour vous, respirez aussi profondément que possible, concentrez-vous sur votre respiration pour vous calmer. Vous pouvez également utiliser des techniques de visualisation ou de relaxation musculaire, si elles fonctionnent pour vous.
  • Demander de l’aide si nécessaire: si vous vous sentez en danger ou si vous avez besoin de soutien, essayez de contacter quelqu’un en qui vous avez confiance.
  • Mettre en place un système de communication alternatif : en cas de difficulté à parler pendant une crise, plusieurs outils peuvent vous permettre d’exprimer vos besoins (cartes de communication, messages pré-enregistrés, vocaux pré-enregistrés, langue des signes simplifiée ou non …).

Si vous connaissez ou voyez une personne en crise, vous pouvez

  • Idéalement, en avoir parlé avant : si votre proche a déjà fait des crises, iel a peut être pu repérer ce qui l’aide ou non pendant ce moment. En discuter en dehors d’une crise pourra vous permettre de l’accompagner comme iel en a besoin, et de vous sentir moins démuni·e. Si c’est quelque chose que vous découvrez à chaud, il peut être intéressant d’en parler ensuite pour apprendre quoi faire au fur et à mesure.
  • Rester calme et compatissant : la personne est déjà en surcharge, et elle craint peut-être le jugement ou le non-respect de ses besoins si elle les a déjà vécus. Essayez de ne pas la charger davantage. Évitez les réactions brusques ou les critiques qui pourraient aggraver la situation.
  • Proposer un soutien pratique si besoin : pour se déplacer, pour effectuer des actions simples, sécuriser l’environnement et vous occuper des curieux·ses si la crise a lieu en extérieur… Offrez-lui votre soutien de manière respectueuse et non intrusive.
  • Offrir un espace sûr et soutenant : créez un environnement calme et sécurisé où la personne en crise pourra se sentir à l’aise pour exprimer ses émotions et se calmer.
  • Vous rappeler que ses besoins passent en priorité : faites-lui confiance si elle vous dit qu’elle a besoin de réagir d’une façon qui vous surprend ou vous inquiète, laissez-lui le temps de redescendre. Même si une crise peut être impressionnante, elle sera souvent mieux vécue par la personne si vous ne cherchez pas à l’empêcher.

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